Archives par mot-clé : Espionnage

Intelligence économique, algèbre et botanique

Durant ces derniers jours, un évènement et deux réactions m’ont interpellés:

L’évènement est la condamnation d’EDF à payer une amende d’1,5 millions d’euros à Greenpeace et à un laboratoire de dépistage pour des faits d’espionnage informatique.

Les deux réactions sont respectivement celle de Claude Revel et de Franck Bulinge.

La réaction de Claude Revel, fort louable, est celle que les praticiens de l’intelligence économique ont adoptés depuis que les « affaires » d’espionnage industriel entachent ce secteur (c’est à dire depuis le début): la pédagogie.
L’argumentaire est bien rodé, parfait, toujours plaisant à lire même s’il n’apporte rien de neuf et que nous l’avons lu ou entendu de nombreuses fois par ailleurs (et ce n’est pas grave vu que la cible n’est pas les initiés mais le grand public)… mais là est le problème: ça fait des années que l’on démontre, dans les médias, par A+B que l’intelligence économique n’est pas de l’espionnage industriel mais pour quel résultat ?
Il faut bien admettre que malheureusement nous prêchons dans le désert. Cela devient préjudiciable car, dans notre effort de démocratisation, nous allons bientôt passer autant de temps à expliquer ce que nous ne sommes pas plutôt qu’a expliquer ce que nous pouvons apporter. C’est devenu vain et inefficient.

Le positionnement de Franck Bulinge est, pour moi, beaucoup plus original. L’originalité n’est pas tant sur le message (que j’ai déjà entendu et que je prône moi-même) que sur l’émetteur. Nous avons un chercheur, une personnalité qui a construit sa notoriété et une partie de sa carrière sur cette discipline et qui fait le choix d’évacuer ce terme de son vocabulaire. N’est-ce qu’une posture, ouvre-t-il la voie ou se met-t-il en marge ? L’avenir nous le dira.

Une fois cela dit, qu’elle peut-être la suite ?
Appeler l’intelligence économique autrement comme le propose Franck Bulinge ?
Personnellement (et je peux me tromper), je pense que substituer un terme par un autre ne réglera pas le problème et ce, pour une raison plus profonde que l’amalgame avec l’espionnage industriel: Continuer la lecture de Intelligence économique, algèbre et botanique

Comment jouer l’espion avec #Viadéo ?

Les utilisateurs de Viadéo ont probablement remarqué le module intitulé « Les connaissez-vous ? » situé en haut à droite de la page.

De chez soi, ce module donne des contacts potentiels plus ou moins pertinents (dans mon cas, rarement pertinents), l’algorithme de calcul devant probablement intégrer des personnes qui ont quelques contacts communs avec nous ou bien intégrer certains mots-clés communs dans les profils,…

C’est une autre partie de cet algorithme que je trouve intéressante et/ou inquiétante, c’est la remontée, dans les contacts potentiels, des personnes qui se sont connectées avec l’adresse IP que l’on est en train d’utiliser.

L’intérêt de cette fonctionnalité du point de vue de Viadéo doit être, je suppose, de se mettre rapidement en relation avec une grande partie de ses collègues sur son lieu de travail.

L’intérêt peut être tout autre d’un café, d’un hôtel, d’une entreprise, d’une administration ou de chez un collaborateur,… bref, partout où l’on peut se connecter, notamment d’un accès wifi.

Un commercial peut récupérer des profils sur un salon, ou dans l’hôtel près du salon. Un consultant peut récupérer un listing de collaborateurs ou d’autres intervenants au sein de l’entreprise dans laquelle il intervient (ou d’autres entreprises dans le cas d’immeubles servant à des bureaux ou des salles de réunion externalisés). Un espion peut cibler le ou les cafés où des employés d’une entreprise ont leurs habitudes,… Je suggère uniquement des usages où, bien sûr, la connexion est éthique et légale, on peut en imaginer d’autres.

En ce qui me concerne, j’utilise aussi cette fonctionnalité de façon plus anodine et seulement taquine: c’est assez drôle de voir l’étonnement, voire l’inquiétude sur le visage d’un hôte à l’énoncé de quelques noms. Qui plus est de personnes forcément proches (pour les recevoir chez soi, leur donner l’accès wifi et suffisamment de temps pour qu’elle aille se connecter sur Viadéo dans un moment d’ennui). Ces personnes, si vous avez suivi le raisonnement, ne sont pas forcément en contact avec l’hôte sur Viadéo.

Un exemple de plus, s’il y en avait besoin, que si vous ne voulez pas laisser de traces à l’extérieur, évitez de vous connecter à certains services d’un accès public, ou non d’ailleurs.

Et vous ? Connaissez-vous d’autres réseaux sociaux qui utilisent le même procédé ?

Du stagiaire chinois au missionnaire de la compagnie de Jésus

En ces temps durs pour le petit stagiaire chinois, allons voyager du côté de sa grande contrée… en septembre 1712 pour une page d’Histoire qui n’est pas méconnue. Cliquez sur l’image pour l’agrandir.

Pour voir la lettre dans son intégralité, vous pouvez consulter les pages 131 à 176 du dixième tome des « Lettres édifiantes et curieuses, écrites des missions étrangères ». Y sont exposés l’Histoire, les techniques de réalisations, la descriptions des manufactures de porcelaine. Le père d’Entrecolles dévoile à la page 141 le secret de la porcelaine que l’Europe cherche à percer depuis des siècles, le kao-lin, qui lui donne blancheur, dureté et translucidité.

Si Li Li, la stagiaire chinoise la plus connue de France pour son implication dans l’affaire Valéo ne fait pas l’objet d’une page Wikipédia, le père d’Entrecolles a quant à lui les honneurs de la version chinoise. Il semble que 300 ans après, les chinois n’aient pas oublié, on peut même sentir une pointe de rancœur par exemple dans cet article qui dénonce la contrefaçon de moindre qualité de la porcelaine fabriquée à l’extérieur de leurs frontières.

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Espionnage et renseignement humain sous la doctrine napoléonienne

Petite escapade d’été. Voici la section consacrée aux espions dans l’ouvrage : « Traité sur le service de l’Etat-Major Général des Armées » écrit par M. Le Général GRIMOARD en 1809 à Paris. On y lit l’importance du renseignement, les différents types d’espions et la manipulation des sources. L’ensemble de l’ouvrage est disponible à la fin du billet. La section présentée ci-dessous se trouve page 195.

 » Un souverain, un ministre et un général ne pouvant trop bien savoir ce qui se passe dans les armées et les états ennemis et même amis, ne doivent rien négliger pour se procurer de bons espions de toute espèce et pour toutes sortes d’usages. On en trouve dans les cours, dans les armées, dans les villes, dans le plat pays et même jusque dans les monastères. Les uns s’offrent d’eux-mêmes, par l’appât de l’argent; on se procure les autres par les soins du Gouvernement, du général ou de ceux qui sont chargés de le seconder.
Il faut confier le département des espions d’une armée, à un homme de guerre doué de beaucoup d’imagination et de réflexion, et faire prendre aux autres officiers de l’état-major des connaissances sur ce détail , pour qu’ils les mettent en pratique lorsqu’ils sont détachés avec quelque division, ou obligés de donner des nouvelles de l’ennemi quand ils font des reconnaissances.
Plus il importe d’avoir des espions qui vous instruisent exactement des projets quelconques de l’ennemi, et plus il est difficile de s’en procurer de bons.

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