Echange avec Cyril Bouyeure, coordonnateur ministériel à l’intelligence économique

Voici un échange atypique auquel a bien voulu se prêter Cyril Bouyeure, coordonnateur ministériel à l’intelligence économique, et je l’en remercie.

Pourquoi atypique ?

Parce qu’ayant rencontré des difficultés à trouver un nombre suffisant de questions pertinentes à lui poser, j’ai sollicité mon réseau de twitternautes afin qu’ils me communiquent leurs questions.

Ils en ressort logiquement un échange un peu décousu, mais d’une grande richesse.

Je ne suis à l’origine que de la première et de la dernière question. Les autres sont les « tweets » non retouchés des contributeurs.

N’hésitez pas à laisser vos commentaires!

Un grand merci à @nblas, @ant11, @MatAbraz, @webosphere, @AmineDigirep, @Merkapt, @Caddereputation


Monsieur Bouyeure, pouvez-vous vous présenter ?

Toute ma carrière a pour fil conducteur les questions internationales. J’ai été diplomate durant dix années, j’ai vécu dans trois pays Taiwan, la Turquie et la Chine, j’ai été conseiller au cabinet du ministre des affaires étrangères, j’ai écrit deux livres, l’un d’économie internationale, l’autre qui est la biographie d’un intellectuel polonais qui a été un des dirigeants de l’opposition du temps du communisme puis un des principaux artisans de la transition démocratique après 1989.

Je suis curieux du monde, persuadé que l’on s’enrichit à regarder et essayer de comprendre ce qui se passe autour de soi et, symétriquement, désireux de contribuer à mieux faire comprendre la France, ses particularités, ce que l’on appelle parfois son modèle (économique et social), à valoriser sa culture, ses idées.

L’intelligence économique, cela consiste à exercer cette curiosité sur le monde en mouvement pour saisir les évolutions en cours, déjà perceptibles mais qui peuvent n’être pas encore intelligibles, à décortiquer, à chercher le sens puis à expliquer à ceux à qui cela va pouvoir être utile.

@nblas : « le déploiement de la coordination IE en région…? »

Il faut expliquer l’IE aux PME et, pour ce faire, dédramatiser, rendre simple et compréhensible que c’est une démarche à la portée de tous. Le réseau régional qui dépend de Bercy va vivre une révolution en étant rattaché, dès cette année, après une première expérimentation en 2009 dans 5 régions (Aquitaine, Franche Comté, Languedoc Roussillon, PACA, Rhône Alpes), dans des directions, les Direcctes, qui regroupent l’ensemble des services régionaux du travail, de l’emploi et de l’économie. La force de frappe sur des questions comme les mutations économiques, les bouleversements qui affectent les territoires et les entreprises va s’en trouver accrue, avec plus de fluidité, moins de double emploi, plus de moyens sur des objectifs mieux définis, en liaison avec les préfets de région.

@ant11 : « que penser du nombre croissant de formations en IE en France, à mettre en relation avec le nombre de postes a pourvoir? »

Nous avons débattu de cette question  lors des assises de la formation à l’IE qui se sont déroulées à Bercy le 14 décembre dernier (Cf. www.ie.bercy.gouv.fr) Il faut absolument mettre sur la table la question des débouchés de toutes ces formations, de leur adéquation à la demande. Nous en avons saisi le nouveau délégué interministériel à l’IE.

@MatAbraz : « son avis sur LOPPSI 2 et la réglementation des professions d’intelligence économique »

Le SCIE que je dirige n’intervient que de loin dans ce débat. On peut comprendre qu’il y a un réel besoin d’encadrer certaines pratiques, lorsque par exemple il y a des risques de confusion entre le public et le privé.

@webosphere : « quel est le budget alloué au dispositif IE avec la plateforme logicielle AMI et l’intégration Bull ? »

Le budget est très conséquent, ce qui explique l’intérêt que le projet a suscité dans la profession (éditeurs, intégrateurs, consultants). Ce n’est pas le plus gros budget qui ait été alloué pour un projet de ce type mais c’est l’un des projets les plus ambitieux du point de vue du champ couvert, du nombre de services différents associés. La transversalité en est le maître mot. Ce n’est pas une mince affaire.

@nblas : « est-ce qu’il prévoit des « partenariats » avec d’autres institutions IE à l’étranger (chez les anglo-saxons par ex) »

Nous n’avons pas réellement identifié de dispositif similaire au nôtre. Nous l’avons présenté à leur demande à certains pays émergents, les pays francophones d’Afrique du Nord par exemple, certains pays d’Europe centrale.

Le volet défensif a un homologue du côté allemand, rattaché au ministère de l’Intérieur; Le volet offensif relève de l’organisation mise en place par chaque pays pour accompagner ses entrepreneurs. Ce qui n’empêche qu’il y a des échanges, au cas par cas mais qui peuvent être très approfondis avec des institutions d’autres pays ou avec la Commission européenne, par exemple.

@AmineDigirep : « Quels process et/ou outils de l’IE contribuent à l’analyse prospective? »

Il faut des outils dans les mains d’hommes qui se posent quelques questions précises et qui vont essayer de trouver des éléments de réponse.

Les aggrégateurs de presse, les bases de données spécialisées sont le premier allié du veilleur et de l’analyste. Les moteurs de recherche et les outils de veille en sont le complément. Il y en a de très nombreux gratuits, présentés sur notre site web (www.ie.bercy.gouv.fr). Le secteur est très innovant, il apporte chaque semaine de nouvelles possibilités pour chercher des personnalités ayant des profils spécifiques, des publications scientifiques, des tweets pertinents… Les éditeurs français sont très bien placés, très innovants.

@Merkapt : « Pourquoi ne pense-t-il pas que la culture française soit un obstacle au travail en réseau ? »

J’ai dit un jour effectivement, en réponse à une interview, que la culture française n’était pas si propice au cloisonnement. L’image du village gaulois retranché, c’est un joli cliché que Goscinny a su génialement illustrer. N’oublions pas que Goscinny était un maître du second degré, d’Astérix à Iznogoud.

J’ai travaillé dix ans en ambassade où j’ai pu observer de près le fonctionnement des administrations de trois pays, j’étais même payé pour comprendre comment cela fonctionnait, mais aussi avoir des échanges avec mes collègues de dizaines d’autres pays. La France n’est pas si médiocre en matière de coordination, que cela soit entre les services ou pour ce qui est de la circulation de l’information entre l’Etat et les autres acteurs, collectivités décentralisées, entreprises… Il y a beaucoup d’autres pays où l’Etat et ses fonctionnaires n’inspirent pas autant de confiance, de crédit qu’en France.

@Caddereputation : « L’IE nécessite t’elle un état d’esprit, ou est-ce l’état d’esprit qui amène naturellement à l’IE ?! »

Les deux : l’IE, c’est d’abord se poser de bonnes questions, avoir une stratégie, identifier ses priorités.

Pour conclure, que vous inspire l’expression « intelligences connectées » ?

Je compte sur vous pour y contribuer. Restons en ligne.

Bien cordialement,

Cyril BOUYEURE

Coordonnateur ministériel à l’intelligence économique

Ministère de l’Economie, de l’Industrie et de l’Emploi

Ministère du Budget, des Comptes Publics, de la Fonction Publique et de la Réforme de l’Etat

Bâtiment Atrium

5, place des Vins de France

75573 Paris Cedex 12

www.ie.bercy.gouv.fr

4 réflexions sur « Echange avec Cyril Bouyeure, coordonnateur ministériel à l’intelligence économique »

  1. Bonjour Terry,

    Du beau travail, bien fait 🙂

    Par ailleurs, j’ai voulu accéder aux outils gratuits de veille cités dans la réponse à ma question, il faut avoir un mot de passe. C’est la bonne URL ?

    Merci de ta réponse.

    Amine.

  2. Bonjour Amine. Non ce n’était pas la bonne URL. Je l’ai modifié, tu peux accéder au document maintenant. Merci de ta vigilance. @ bientôt.

  3. Une petite interrogation quant à la laconique réponse à la question posée à Mr BOUYEURE, concernant son avis sur les dispositions de la LOPPSI en matière d’intelligence économique. En quoi celles ci dissiperaient t-elles (sic)  » ….des risques de confusion entre le public et le privé. »…..
    D’autre part, doit on comprendre que seules certaines organisations « privées » sont essentiellement intervenues dans ce débat……

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